Crise,Mutation, Evolution ou Révolution ?
Chronique politique du vendredi matin des Matins Luxe sur Luxe Radio
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Les problèmes des subprimes, de la dette souveraine, des déficits budgétaires, de l’euro, du chômage et des tensions qui en suivent, sociales et politiques, illustrent-ils la « Crise » ? Est-ce que ce vocable, la crise, rend compte, à lui seul, des difficultés que doivent affronter les pays, les uns après les autres, et parfois plusieurs ensembles ? Quelle est cette situation à laquelle l’Europe essaie de faire face, et d’autres pays avec elle ? 0n a raison de parler de la nécessité de la croissance. Seule la croissance peut donner la possibilité de réduire les inégalités sociales, de vivre mieux, à condition qu’une frange de la population ne vienne pas confisquer à son seul profit les fruits de cette croissance. C’est pourquoi la croissance n’est pas ce long fleuve tranquille auquel souvent on l’associe.
Les innovations techniques imposent leur rythme à toute croissance, en bouleversant nos modes de vie, provoquent des inégalités y compris du chômage, à leur début. L’histoire nous enseigne que l’innovation est révolutionnaire, du fait qu’elle remet en cause la construction même de la société. Rappelez-vous Gutenberg et plus près de nous l’informatique. Les nouvelles technologies engendrent des crises économiques, sociales, particulièrement dans l’enseignement et bouleversent le monde du travail par ses exigences de formation. Souvent elles suppriment la notion de main d’œuvre non spécialisée et bouleversent la hiérarchie de la classe ouvrière. L’absence de formation continue devient suicidaire et des pans entiers de l ‘activité économique sont à la recherche de personnels qualifiés.
L’irruption des techniques de l’informatique est, pour une grande part, à l’origine de la crise financière, du fait du détournement de la finalité de ces techniques. C’est toujours le cas, au début de la propagation de nouveaux outils. Il faut du temps pour que la société les assimile et pour que la loi mette en place les mesures qui interdisent leur confiscation à des fins intolérables pour l’ensemble de la société. Avant que la révolution informatique ne produise ses effets positifs, qu’on réalise les possibilités nouvelles qui s’ouvrent et accélèrent le développement et la croissance, que de crises et de souffrances. Les diplômés chômeurs illustrent en vérité l’inadéquation d’une formation dépassée et inadaptée aux exigences des temps nouveaux.
La construction en cours actuellement de notre monde se fonde sur cinq centres : le contrôle des révolutions technologiques, des ressources naturelles, des nouvelles techniques de communication et de l’informatique, de la finance mondialisée et des armements de destruction massive. Nous vivons une ère de révolutions technologiques qui imposent la transformation des modalités d’organisation du monde du travail et ses moyens de production ainsi que la productivité globale du travail social. Une vraie sortie de crise n’est pas pour demain, car elle découle aujourd’hui d’une remise en cause des structures actuelles de notre économie.
Les années qui viennent verront quatre mutations technologiques gigantesques. Leurs retombées énormes, concerneront aussi bien l’économie, que nos
structures sociales et notre vie quotidienne. Il s’agit des nanotechnologies, de la biologie, de l’informatique et des sciences cognitives. Elles provoqueront le clivage habituel entre conservateurs et modernes, entre les défenseurs des avantages acquis et les réformistes. Seuls l’adaptation des structures de la société, du monde du travail, de nos mentalités mêmes, l’assimilation des logiques nouvelles, nous permettront de profiter du Progrès, de vivre mieux, plus libre et plus longtemps.
Entre temps, la lucidité devant les exigences de ces avancées, ne doit pas nous faire oublier les éclopés de ces mutations, et la solidarité avec ceux-là mêmes, nous impose non pas de protéger les emplois mais les personnes. Selon la façon dont les politiques vont gérer ces mutations, nous vivrons une évolution ou une révolution.